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11 janvier 2011 2 11 /01 /janvier /2011 07:28

 

7h28. Je suis déjà prête et il me reste une heure  avant d'animer  un cours sur l'agressivité et la violence...

Le temps de vous écrire un billet. Je vous livre mes pensées matinales, en vrac.

 

J'entends la pluie régulière, incessante, qui scande d'un rythme soutenu mon éveil. Lève toi...Le réveil a sonné, ma fille pointe son nez. 

Le temps du premier renoncement de la journée: rester au lit juste encore un quart d'heure. Non! Bon quelques minutes. Non plus. 6H45.

 

Je veux rester dans mon rêve, celui  où je gagne 360 000 €. Je me souviens très rarement  de mes aventures nocturnes. Là, je m'en souviens si bien que je pourrai en faire un clip, le mettre en images. Des éléments m'échappent et vont disparaître au fil de mon agitation. La question est : Est ce un signe? Faut-il que j'achète un billet, un loto flash, un Banco...


 

 Je m'extirpe de la couette et comme chaque jour, je descends me servir mon café, programmé la veille, puis je me recouche au moins  un quart d'heure, à l'écoute de France Inter ou  France culture.

 

Informations sur Al-Quaida au Sahel, les otages exécutés au Niger, avec un éclairage d'un prof de Sciences Po. Judy Foster sera la présidente des Oscars en Février, pluie sur l'île de France toute la journée, émeutes en Algérie, "la police tire même sur les enfants..." .

 

Deuxième renoncement: Une actualité rayonnante ou un peu plus légère. Judy coincée entre le terrorisme et la gronde du peuple algérien, la réponse du gouvernement par une riposte meurtrière...Les propos enrobés d'un ton monotone, monocorde.

 

Troisième renoncement: Un système politique qui cherche à comprendre, qui se centre sur l'écoute démocratique et construit des réponses de gouvernance pour le bien être de tous et non le profit de quelques uns.

 Naïve, optimiste, idéaliste...Au réveil, c'est un bon remontant pour  affronter tous ces renoncements et résister au climat morose.


Quatrième renoncement: Une journée ensoleillée comme celle d'hier,

 

Enfin cinquième renoncement: avoir encore une heure pour vous écrire...

 

Je pense à la chronique de l'agnèsmasquée sur le temps qui nous échappe, ce temps que l'on comprime. Je vous conseille le blog de l'agnès masquée, Assistante Sociale en hôpital psychiatrique pour adultes. Un ton drôle, parfois railleur. Elle témoigne de sa colère contre les systèmes institutionnels, son attachement aux patients,  son épuisement, ses doutes de yogi, ses convictions à continuer à, se frotter à la folie des uns (pas toujours de ceux désignés comme tels) ou la lucidité qui y mène, ses aventures de week-end, ses lectures... 

 

 

 

 

Voici un poème pour éclairer  cette matinale.

Prenons le temps de déguster ce poème de René Char, celui qui s'offre à nous, pris au hasard en ouvrant son recueil.   


   

 

Morte Saison

 

Des immobilités sans doute bienfaisantes

Ont accru le silence

Les monts ont dévêtu leurs épaules hardies

 

Peut-être aux cimes

Au même passé au même avenir

Agonise un être qui eût soin de vivre

 

Tout demeurera dans le pesant silence

Jusqu'à ce que dressant leurs avants-bras d'étain

Les religions du soir en cortège s'avancent.

 

  René Char

 

 

  LN

 

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7 janvier 2011 5 07 /01 /janvier /2011 08:41

Le jour se lève à peine sur la ville. Au second étage, Arcan entrouvre les yeux. Derrière le voile de la nuit encore présente, un rayon de lumière lui suggère de se lever. Machinalement, il presse la touche de son PC. Quelques sons familiers ponctuent ses étirements matinaux. Dehors, les arbres nus se courbent  contre la brume et le vent. L’hiver y  a élu domicile. La coulée blanchâtre tombée du ciel, annonce le givre. Attablé dans sa cuisine, ses pensées échouent à mettre de l’ordre dans son avenir. Plus rien ne retient son attention. Son regard balaye furtivement son univers.

Le reflet de ses tourments, se détoure à la surface noire de son café. De nouveau, il pense à sa voisine. Elle martèle ses pensées. Il doit se décider, déjà trois jours qu’il ne l’a pas vue, ni perçu le moindre mouvement chez elle. Il ne connait d’elle que sa silhouette, son allure vive, ses rythmes noctambules.  La douche brûlante ouvre ses pores, il conclut son éveil par l’eau glaciale. Ses gestes rapides l’habillent en un temps record. Envahi d’une angoisse inattendue, il se sent mélancolique.

 

« Prends ta vie en main, sinon tu resteras à la merci des autres », la sentence de son père cisaille son abdomen, obstrue une seconde sa conscience. Qui sont ces autres ? Lui qui est inexorablement seul. Il y a juste elle, sa voisine,  qui subrepticement a infiltré la monotonie de son existence. Chaque jour il guette ses pas dans l’escalier. Aujourd’hui, il doit vérifier qu’elle est toujours là.  Et s’il lui était arrivé quelque chose, là tout près, juste au dessus de chez lui, sans qu’il n’ait eu l’intelligence ou plutôt la moindre attention à l’égard des autres, de la vie, en dehors de son existence minable.  Une autre voix résonne en lui, il ne sait plus d’où elle vient, de son père, sa mère ou son frère disparu. La même confusion opacifie ses souvenirs d’enfance. « Prends soin des autres, des tiens, ils sont les garants de ton existence... N’oublie jamais que ta vie dépend de ton regard». Il ne comprend toujours pas le sens caché de cette injonction, mais l’’intensité de ces mots lui enjoint de ne plus perdre de temps.


Ses pas le précipitent dans l’escalier.  Troisième étage. Un  fond de silence résonne dans son entrejambe. Pas de sonnette, une seule inscription - Mélo - d’une écriture enfantine, dans le cercle d’une  clef de sol, gravée sur la peinture carmin de la porte. Il pianote une énième fois sur le chambranle. Il colle son oreille : aucun frémissement, pas la moindre octave. Il entre sans y être invité. Pas de vestibule, ni de corridor. Directement, il trébuche sur le dénuement d’une pièce. Seul un meuble brise  la vacuité de l’espace, une table basse où s’empilent  les cris étouffés du manque, les expirations d’une décadence suicidaire. Tout l’attirail de la défonce gît là : une cuillère roussie par la flamme, du papier à rouler, un morceau de miroir éclaté, un garrot.  Au bout de la pièce, l’opacité blanchâtre du claustra japonais, anéantit ses hésitations à poursuivre son exploration. Un secret de corps de femme froisse l’horizon de ses certitudes. Etendue sur le ventre, en escargot colimaçon, sa peau métisse apparaît sur le lobe de ses pieds qui dépassent. Sa nuque « d’un infini roulé blanc », émerge des contours de sa silhouette,  perlée dans le drap de coton, gris pâle. 

Arcan se fige d’émotions, débordé par ses sens. Une légèreté furtive l’enveloppe. D’un flash éblouissant, il sillonne les aspérités de la vie de sa voisine. Son hyper-vision l’entraine sur les pentes vertigineuses  des ombres de l’existence de Mélophine. Il a découvert depuis peu, son aptitude à évoluer à son gré, dans l’intériorité de ceux qu’il a choisi d’approcher, pour déchiffrer  le mystère de leurs  âmes.  La  spirale d’une lumière intérieure lui rappelle qu’il se trouve à l’orée de son  acuité momentanée, et qu’il ne doit pas en abuser.  Il s’immisce dans la conscience de Mélophine. Il se concentre, ferme les yeux et pénètre au fond des cryptes où sourdent des cris étouffés, des sanglots ravalés.  Le vrombissement puissant d’un avion déchire ses tympans, le ramène au seuil du réel. En image ralentie, à pas feutrés,  Arcan s’approche. Son pouce hésitant presse le point de vigilance du cœur, à la marge d’une tache bleutée hémato-phone.  Le pouls de Mélophine bat en cadence régulière une sonate de Chopin. Rassuré, il s’en retourne à la désolation du salon.


Dans une joie intérieure, contenue, Arcan dézingue l’atmosphère mélancolique : les cendriers se vident, la cafetière ronronne, la table basse fait peau neuve. Ici aucun siège pour prendre place. On ne fait que passer. A contrario, il décide de s’attarder, s’assied par terre,  décapsule la dernière bière et s’imagine être un autre qu’il y a une heure. Il perçoit une agitation dans la chambre. Sa montre indique 16H17. Il se retourne, elle est debout, fragile, béquillée à la porte. Elle le regarde. Médusé, il lui sourit.

Le cœur de Mélophine se réaccorde. Elle murmure un psaume a capella. Dans l’interstice de ses pupilles,  elle l’interroge, sans un mot. Ses grands yeux noisette l’envoûtent. Il balbutie.

-         Je suis passé voir si tout allait bien. Je ne vous ai pas vue depuis trois jours…

Mélophine a la sale habitude de se méfier. Pas d’exception pour l’intrus. Elle reconnaît le voisin du deuxième. Sans le perdre de vue, elle se poste face à lui, s’installe et plante ses étourdissements dans son cortex. D’une seule voix, elle lui synchronise le dernier requiem de sa vie. Submergé, il se rétracte, lutte pour s’en échapper. Contre son gré, la mélodie de Mélophine l’envahit. Il explore ses vibrations souterraines, archéologiques. Il prend ses douleurs, les conjugue en vain. Il est 17h. L’héroïne est toujours là, assise, blottie, encapuchonnée dans son pull trop grand. Quant à lui, vidé, anéanti, il se souvient. Quand son frère a disparu, il a avalé la douleur de sa mère. Toujours là, elle retentit sur l’horizon de celle de Mélophine.  Comme une marionnette, son corps se déplie, par à coups. Abasourdis, hors du temps de cette journée là, les deux  s’étonnent. Elle, d’être toujours en vie, lui, toujours animé  de ce désir d’y croire, à la vie, l’en-vie. L’ombre du soir tempère leurs élans. La noirceur planétaire semble ravaler tout désir de lever le voile de l’autre.

-          Je vais rentrer.

Elle n’a toujours rien dit. Ses yeux lui intiment de rester.

Il hésite, n’est pas sûr de l’avoir compris. Il se lève, dans le frigo, seuls deux yaourts le défient de s’attarder davantage. Elle sourit, il se rassoit, désignant la cafetière qui hulule :

-          Avec ou sans sucre ?

-          On commande des pizzas ?

Elle s’esclaffe d’une joie infantile comme lorsqu’elle jouait, enfant.

 

Mijoty s’étrangle en buvant son infusion du soir. Un signe... Elle s’est promis de vérifier l’état de Mélophine avant ce soir. 19h17 ... Elle enfourche son tubeless. Dans le soleil couchant, elle entend une symphonie complice. Confiante, elle s’en retourne. Sa bouilloire sifflote. Dehors, un souffle glacial, consigne les humains chez eux.


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A suivre...

LN

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5 janvier 2011 3 05 /01 /janvier /2011 22:07

2010, Une année sur la terre, un documentaire vu hier à la télé. Au-delà des images inédites et spectaculaires, cette émission donne un récapitulatif impressionnant des catastrophes naturelles de l’année, sur fond d’un discours un peu lisse, très propre.  

 

« En 2010, la planète bleue a réservé à ses habitants douze mois spectaculaires de découvertes, de chaos et d'émerveillement. L'eau, la terre, le feu et l'air : ces quatre éléments créateurs, mais parfois destructeurs, ont réservé aux hommes des moments magiques, multiples et fragiles».  Les moments magiques font-ils référence aux pingouins qui s’ébrouent dans la mer, ou les pingouins qui  râlent d’attendre leur avions, en raison des intempéries de neige en Europe. Ou encore les oiseaux mazoutés qui, enfin, sortent figés mais vivants de l’océan...

 

« De janvier à décembre, la Terre n'a cessé de lancer de terribles défis : tremblements de terre, inondations, hivers volcaniques et incendies. » Défis ou ultimatums. Un électrochoc pour penser  l’avenir plutôt que de l’avaler, sans déglutir,  pour être sur de ne pas perdre une miette de la frénésie moderne.  

Revendiquons des pauses de  paresse. L’éloge de la paresse, l’éloge de la caresse, l’éloge de la fessée… (Trois livres à découvrir ). A vous de choisir… La nonchalance, associée à l’amour souffle une respiration de bonheur, injecte un fluide d’énergie, plus puissant que la gelée royale ou le guarana.


  « L’homme a pour lui une autre force, sa détermination à vivre et sa capacité naturelle à l'espoir. » Des milliers ont perdu toutes capacités, même celle de respirer…Les conséquences invisibles, indicibles, transparentes des catastrophes environnementales ne perturbent pas encore nos consciences. Il faut remercier les médias de ne pas avoir gâché nos vacances d’été, lourde période de cataclysmes, en étant très « light », évitant de nous  inonder des vagues sismiques, de pluie, de boue, de vent, de tornade, à l’autre bout de la planète. Très loin aussi  de notre pensée : Indonésie, Pakistan, Chili. Mais pourquoi nous ont-ils tant parlé d’Haïti, et ils en reparlent : des émeutes, des populations encore sous des abris de fortune.


 Je ne me plaindrai plus des « températures en dessous des normes saisonnières ». Demain, j’écouterai, sans broncher, la météo.  Je sais pourquoi tous les jours je me rappelle que la vie est un souffle qui passe. Au demeurant, j’entretiens mon souffle:  je cours et je fume moins …

 L’impuissance, la toute puissance, la mienne, culpabilité et réassurance, la mienne encore et peut être la vôtre... Les deux faces d’une même médaille… Les  catastrophes ne touchent ni Paris, ni mon gîte en Ile de France, ouf !

 Je peux aller dormir tranquille, jusqu’à mon prochain électrochoc télévisuel.  

 

Bonne année, bonne santé, bonnes catastrophes naturelles !

 Des séismes à la pelle

 Des inondations par milliers

 Pour salir mes souliers.

 

LN avec la contribution de Charlie pour le point final.


  Un jeu pour vous assurer la chance en 2011: Indiquez pour chaque photographie (6,  la dernière étant un hymne à la nature retrouvée), de quelle  catastrophe, s'agit-il?

Vos réponses sont les bienvenues par mail en cliquant sur la rubrique Contact, colonne de droite.

Que gagne-t-on? Bonne question, en suspension de particules élémentaires selon le niveau de participation.                      

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3 janvier 2011 1 03 /01 /janvier /2011 09:42

Hier je n'ai pu m'empêcher de regarder le film français, Mariages,   "un film de Valérie Guignabodet avec Jean Dujardin,  Mathilde Seigner. Ils ont 25 ans et se marient aujourd'hui. Ils ont 35 ans,   se sont unis il y a dix ans et se déchirent aujourd'hui. Ils ont 45 ans, se sont déchirés il y a dix ans et tentent aujourd'hui de se réconcilier...Trois mariages dans un mariage, trois couples durant les 24 heures d'une noce quelque peu perturbée par les doutes et les crises de chacun". 


Film intimiste, facile, peut-on penser, du moins assez classique dans le genre "petit film français sympa". J' y ai retrouvé l'écho que j'avais eu la première fois. Des dialogues assez percutants, des acteurs performants. Le film évoque moins  le mariage que la vie de couple. Y sont révélés lors d'une cérémonie de mariage, les non-dits, les tromperies, les mensonges, l'amour propre au détriment de l'amour de l'autre, les hommes qui ne regardent plus leurs femmes,  devenues, selon elles,  des meubles...

Rien d 'original, je vous l'accorde. Mais ce que j'aime dans cette histoire, c'est l'effet miroir des histoires des uns et des autres qui mettent en scène la typologie de combinaisons couplées.

Je vous laisse à vos interprétations, concernant cette phrase de Lio que j'avais déjà notée, en son temps, avec l'espoir d'y parvenir, aujourd'hui j'ai l'impression d'avoir fait un bout de chemin sur cette voie. "Pour aimer l'autre, il faut pouvoir être libre. Pour être libre il ne faut plus avoir peur". Peur de soi, de l'autre, peur d'être abandonnée, peur de vivre...Quelle ambition. Le tout est de se mettre en route...

 

Un autre film, The Tourist, avec trois têtes d'affiche : Angelina Jolie, Johnny Depp et Venise. Pas de scénario, des acteurs non engagés dans leur rôle, en touristes, peu d'action, une intrigue très minimaliste dont on a dès le début compris le dénouement. Seule satisfaction pour ma part, un détour par Venise, sa lumière, ses palais, une atmosphère magique. Le désir renouvelé d'y retourner en amoureux, cette fois.

 

DSC 0099

 

2011, encore un début d'année, où j'aime à croire, à penser que tout est possible...Si, si, je vous assure, l'horizon est lumineux de surprises, au delà des incertitudes!

 

 LN

 


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31 décembre 2010 5 31 /12 /décembre /2010 10:44

A la veille d'un premier de l'an, je dois bien considérer que c 'est bien la fin d'une année.

Je n'aime pas les fins de ...


Je ne crois pas en la finitude ou plutôt je me défends d'y croire.


Je  considère la fin de... comme le début d'autre chose, une continuité,  avec des tournants, parfois en épingle à cheveux, des ruptures nécessitant parfois de prendre son élan et de sauter par dessus un précipice,une page froissée, à tourner,  sans la déchirer ou un rebondi sur un trampoline...

 

Demain est un autre jour ...mais celui ci est à savourer dans des bulles pétillantes. Tchin!

 

Rêvons à l'année 2011, à la découverte d'horizons prometteurs.

 


Cette sphère annonce l'arrivée d'Arcan dans le septième épisode d'Empreintes et sortilèges qui ouvrira l'année 2011...

 

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26 décembre 2010 7 26 /12 /décembre /2010 16:50

 

Avec emphase et détermination, Trekaï prend la parole :

-                 Je vais rafraîchir vos mémoires défaillantes. Souvenez-vous, nous avons au dernier symposium, traité de la question du sens de nos actions. Nous avons du admettre que l’ensorcellement des bébés révèle une proportion croissante des chances, par rapport aux mauvais sorts. Ce constat partagé par l’ensemble, s’étaye noir sur blanc, sur le Registre des Interventions. Nos sortilèges, devenus enchantements, nourrissent notre perte. Nous devons retrouver notre identité dans le manichéisme, ce qui fait notre fierté, notre puissance inégalable. J’ai ainsi proposé l’abrogation de cette loi ancestrale, qui donne aux seules sorcières, la prérogative de bénir les nouveau-nés. Cette coutume provient de l’influence des fées et de notre jalousie séculaire à leur égard. Il est temps que les sorciers recommencent à contaminer les humains en leur insufflant le sens du fanatisme, de la loi du plus fort. La mère de Mijoty a ouvert la voie, inauguré de nouvelles fondations, en couvant sa proie bien après la naissance. Mais elle a insufflé à cet enfant, le fluide de l’intelligence combiné à celui de l’altruisme, un enchantement réservé aux fées. Comment a-t-elle pu renier notre culture du maléfice, elle, dont les ancêtres étaient les plus fervents fondateurs de notre colonie, ici sur Terre? Elle a payé pour avoir désavoué ses origines, trahi le phalanstère. Vous étiez tous là quand je l’ai condamnée, malgré son audace à laquelle j’ai rendue hommage.

 

La doyenne l’interrompt :

-                 Vous pensiez pouvoir seul bouleverser et métamorphoser notre système, nous imposer votre pensée, refonder notre communauté sur vos propres idéaux. Je reconnais bien là votre mégalomanie…

 

-                 Vous ne comprenez rien, aveuglés par vos traditions. J’aimerai entendre ce qu’en pense la collégialité de la Haute Cour, Mijoty en particulier…

 

Mijoty s’indigne en silence. L’ancien Président, son Maître, la somme de se prononcer, de prendre partie, pour ou contre lui. En quelque sorte, il lui offre l’opportunité de soutenir la rébellion de sa mère, au moins de la réhabiliter dans son hardiesse excessive et inconsidérée, sa témérité. Le souvenir de la naissance de Mélophine l’éblouit dans un flash.

Instantanément, elle se reprend et conjure sa culpabilité pour avoir elle-même transgressée la règle.

 

-                 Nous ne sommes pas ici pour débattre de notre avenir ou des réformes à engager. Nous sommes réunis pour statuer sur les fautes qui vous sont reprochées. Poursuivez!

 

-                 Vous aussi, je vous ai trop bien enseignée le sens des règles, mais je vous ai aussi suggérée de savoir les questionner. J’avoue avoir enfreint cette loi. En effet, j’ai sur un garçon inscrit mon empreinte. J’ai scellé son destin par une ablution au Lacryma Christi, mélangé à une pincée de chaux. Il garde depuis sa naissance la trace de cette bénédiction, une mèche blanche sur ses cheveux noirs corbeaux. Ainsi, je l’ai gratifié d’un pouvoir surhumain, une hypervision : il a la capacité de lire dans les pensées des personnes qu’il côtoie, mais je crois qu’il l’ignore encore. Son iris développé en un regard translucide
 - l’instrument de son talent - ne lui est apparu qu’il y a 2 ans, à la puberté.

 

Un des assesseurs l’interpelle. C’est un de ses anciens élèves. Trekaï lui reconnait un esprit vif, curieux et très actif dans la recherche.

 

-                 Bien. Vous reconnaissez votre délit. Votre culpabilité est donc actée par votre seul aveu, nul besoin d’autres preuves. Mais quelle est votre ambition ?

 

-                 Je doute de vous convaincre d’œuvrer pour l’intérêt de notre congrégation. J’aspire à réaffirmer sa grandeur, qui ne s’exprimera que dans notre puissance à guider les hommes égarés. Arcan est l’instrument de mon pouvoir, le futur instigateur d’un mode de pensée qui combattra l’égarement, la nonchalance et le plaisir pour réhabiliter la force, comme rempart à la dégénérescence du monde vivant. Cet homme sera mon guide innocent, pour déjouer les âmes humaines et les assujettir. Chacun d’entre nous peut s’introduire dans un être humain, pour reconquérir notre pouvoir. Unissons-nous pour cette cabale politique !

 

L’audition touche à sa fin. La plaidoirie de Trekaï suffoque l’assemblée, effrite les fondations antiques de l’ordre de sorcellerie. Ses aveux, mais surtout son argumentaire fallacieux convainc chacun des jurés de sa condamnation immédiate.

 

Mijoty se tourne vers ses adjoints :

-        L’un d’entre vous souhaite-t-il intervenir?

 

En guise de réponse et à l’unisson, fixant Trekaï de leur mauvais œil, les voix des jurés entonnent un chant lugubre et dans une rage démoniaque leur hymne statufie l’accusé.

 

Les délibérations convergent vers la reconnaissance de sa trahison, son avidité, son éloge de la magie noire. Mijoty se remémore les exhortations du Maître prodiguées à ses élèves, pour se hisser au sommet de l’excellence, dans la pratique de la magie noire. Elle se souvient encore de ses conférences sur l’humanité décadente, avachie.

 

Jusqu’à l’aube, l’assemblée délibère sur les menaces voilées, proférées par Trekaï. Mijoty s’enflamme.

-                 La sorcellerie doit se renouveler, non pas dans le fanatisme, mais dans les pratiques de l’enchantement. Nous devons nous libérer de notre position trop dogmatique qui obstrue notre horizon. Craignons les complots, les scissions. Le Maître a sans doute déjà fomenté une conspiration, attisé la révolte chez certains de ses disciples. Soyons unis. Attelons-nous sans tarder à dépoussiérer ce Code, à l’actualiser, puis éclairons nos pairs pour qu’ils nous rejoignent et se rallient à notre point de vue.

 

Sans en avoir réellement conscience, ce jugement inaugural peut signer l’origine d’une profonde mutation et l’abandon de l’ordre établi, de la doctrine pesante. Plus que de l’audace, cela nécessite de l’effronterie. A l’issue de ce huis clos, les décisions collégiales sont unanimes.

 

-                 Trekaï mérite la sentence suprême. Nous devons le neutraliser durablement. Qu’il subisse l’éblouissement par le disque solaire, tel Œdipe. Qu’on lui couse les paupières et qu’on le porte sur la plateforme, face au soleil, jusqu’à sa complète cécité. Enchainez le et mettez le sous surveillance, qu’il ne puisse communiquer avec aucun de ses complices.  Dès ce soir, je réunis le Directoire, pour initier nos travaux et rendre publique notre verdict.   

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A suivre...

LN

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19 décembre 2010 7 19 /12 /décembre /2010 20:18

 

Les Amants Cathédrales

 

Solive le bien-nommé, était un charpentier robuste.

Ogive, une femme aimante, tout en buste.

Ogive rêvait, tout à ses hauteurs,

Pour la soutenir, d'une auguste raideur.

Solive ne pouvait rester indifférent,

À la ferveur pressante, de tels élans.

Ils s'assemblèrent à la croisée du chœur,

Tutoyant les dieux, ces fins connaisseurs.

Sous la poussée tellurique des deux amants,

Les rosaces flambèrent au firmament.

Depuis lors, témoignent les voûtes ancestrales,

De leurs étreintes, au relief d'une Cathédrale.

 GuY

 

 

 

Un Samedi que je pensais comme les autres...  J'ai ouvert l'écrin de ses mots.  J'ai lu, relu ses  perles nacrées, d'un amour partagé. J'ai hésité à le garder pour moi. Mais je le trouve si beau que je vous le délivre comme une touche de poésie.



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LN

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15 décembre 2010 3 15 /12 /décembre /2010 09:59

 Toi qui attends avec impatience la suite  d'Empreintes et Sortilèges, je t'invite à participer au déroulement du procès de Trekaï, en me suggérant la suite et le verdict de ce procès.

Peut-être sera-t-elle source de mon inspiration, pour créer le 6ème épisode.

Pour t'aider au mieux, je t'offre un récapitulatif des 5 premiers épisodes.

 

Empreintes et Sortilèges
par tanamo

 

Tu as jusqu'au 25 Décembre, jour de Noël pour m'envoyer tes idées, par mail, en cliquant sur contact, colonne de droite. Tes  réponses seront comme des cadeaux...

 

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12 décembre 2010 7 12 /12 /décembre /2010 18:59

Theatre-1---L-Asile-De-Norwich-blog.jpg

 

La Haute Cour investit le théâtre de l’asile. Dans ce prétoire improvisé, six grandes fenêtres laissent filtrer des éclats crépusculaires. Le jour s’effrite sur l’arc de lune. Des stries de lumière zèbrent le sol, trébuchent sur les fauteuils, teintent la pièce d’une clarté sibylline. Le plafond en dôme, surplombe 20 rangées de fauteuils, d’un cuir poreux, lacérés, alignés de chaque coté d’une allée centrale. A l’orchestre, les sièges en cuir défoncés, se soudent les coudes. Au balcon, il ne reste plus que quelques fauteuils éventrés, arrachés du sol.

Sur l’aile gauche de la scène, un piano recouvert d’une poudre cendrée, qui atténue le noir et blanc des touches, évoque le fantôme d’une musicalité défunte. Le rideau est levé. Sur le devant de la scène, s’ordonnent en une seule ligne droite, onze coussins noirs et ronds. En arrière-plan, sur une table basse vermoulue, en bois écaillé, est posé un grand livre vert et un encrier de céramique.

 

Il est 19h 02. Le cadran sub-solaire se connecte sur la lune. Mijoty ouvre la procession, suivie de dix ombres, sous capes noires. Le Scribe-Parfait ferme la marche et s’installe sur la scène, en retrait, prêt à consigner les débats dans sa mémoire.

 

Trekaï est déjà installé au cinquième rang, défiant d’un regard rogue ses accusateurs. Il ne s’est encore jamais assis du mauvais coté, sur ces fauteuils déglingués. Il choisit celui au bord de l’allée centrale. En familier de ce lieu, pour y avoir présidé plusieurs audiences, il maîtrise tous les actes de procédure.

Il se souvient avec amertume du procès de la mère de Mijoty. Il tenta de l’épargner, de la défendre, mais les jurés tranchèrent et leur sentence fut irrévocable. Il reprit tout le code, chercha en vain un arrêt de jurisprudence, fouilla la mémoire des affaires de la Communauté. Aucun vice de forme, aucun cas d’école pour justifier les actes de la coupable. Face à ce vide juridique, il plaida son innocence, sa bonne foi, son fort engagement dans la survie du groupe. Mijoty, au premier rang, le supplia de son regard candide. Après le jugement, elle s’enflamma, répandit sa rage d’enfant. Sa mère d’un geste naturel, l’apaisa d’un sourire désabusé. Puis, elle subit la sentence : radiée et expulsée, elle vivrait en errante dans les tunnels des cieux. Elle devait disparaître à jamais. Depuis lors, pas un jour ne passe, sans que Mijoty n’attende un signe de sa mère.

 

Aujourd’hui, Trekaï s’attend à une condamnation sévère. Les assesseurs l’ont trop longtemps envié de sa position prestigieuse, pour ne pas envisager enfin, l’heure de la vengeance. L’occasion est trop belle de l’évincer, le réduire, l’humilier. Il ne peut compter que sur la clémence de Mijoty, mais l’alliée d’hier est devenue son pire adversaire. Il n’est plus sûr de personne. L’inculpé peut se faire accompagner d’un confrère, mais il est venu seul. Aucun spectateur en dehors de l’accusé et d’une ombre feutrée au dernier rang : un doyen garant du strict respect des règles de l’instruction et du bon déroulement de l’audience. Dura lex, sed lex : La loi est dure, mais c’est la loi.

 

Mijoty s’assied au centre de la scène. D’un mouvement de tête, elle engage ses assesseurs à prendre place. Ses assistants se tiennent comme elle, assis en lotus, sur les coussins, le corps très droit, le regard dans le vide, tourné vers le fond de la salle. La nuit tombée, l’ombre du fond de la salle s’avance pour allumer les photophores, où dansent les flammes vacillantes de bougies rouges, une devant chaque juré. Trekaï reste inaccessible aux regards. Sa silhouette révèle néanmoins son agitation fébrile, agacée. Un cierge planté sur un support de fer forgé, est placé à proximité de l’accusé. Les lueurs sont la seule vibration de l’assistance.

 

La doyenne prend la parole et sa voix résonne dans l’hémicycle, tandis que les regards convergent vers le cinquième rang. Trekaï ne cille pas. Ses pupilles plongent dans chaque terme prononcé, tentant d’en déjouer le cours. Après avoir rappelé les règles de la Haute Cour : confidentialité, égalité devant la loi, application stricte du Code, présomption de culpabilité, obligation de présenter des preuves et contre-preuves, défense assurée par l’accusé ou assisté d’un confrère, la requérante déroule les motifs d’inculpation :

- Vous comparaissez devant la Haute Cour. Vous êtes accusé d’avoir outrepassé vos fonctions. Vous avez transgressé la loi qui réserve aux seules sorcières, le pouvoir de bénédiction des bébés. Un contrôleur assermenté vous a surpris en train de bénir un nouveau-né, prénommé Arcan et qui plus est, de lui avoir administré une dose de chance hors normes. Malgré votre ingéniosité à effacer l’enfant des listes, il est formel. Il vous a entendu sacrer le nourrisson et a vu le rituel d’ensorcellement. Nous avons visionné ses souvenirs, qui corroborent en tous points ses assertions.

Nous avons suivi le garçon, aujourd’hui âgé de 17 ans, afin de pouvoir prouver vos méfaits et découvrir les effets de votre envoûtement. Enfin, nous avons démasqué votre subterfuge. Vous l’avez pris sous votre aile, capté sa liberté à son insu. Vous en avez fait un surhumain, doté d’une hypervision, pouvoir qui nous est strictement réservé.

Quelles étaient vos intentions? Qu’avez-vous à dire pour votre défense?

 

D’un mouvement éclair, Trekaï se poste au centre de l’allée, contemple la flamme, reflet de son agitation intérieure.

 

- Alors, nous vous écoutons. Percez au moins le mystère. Dans quel dessein avez-vous usurpé cette fonction et par la suite, parrainé ce gamin?

 

La voix rauque de la doyenne stimule sa résolution de prendre la parole...

 

88199033sorciere-jpg

A suivre...

LN

 

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10 décembre 2010 5 10 /12 /décembre /2010 08:06

Rouecompo.jpg

 

 

Hier, j'ai arpenté le quartier Opéra -Tuileries comme une touriste. Après avoir pris un café en terrasse , avec ma fille- rien n'arrête les enfumées- elle m'a entrainé dans les magasins classiques : Mango, Zara. Le but était de me dénicher une fringue sympa, c'est à dire élégante, confortable, jolie...Sur les cintres, sur les tables, une seule tonalité sombre, des couleurs  beigasses, noires, marrons tirant sur le moutarde. Des hauts ringards qui me font penser aux tenues de mes maitresses d'école, il y a quand même  plusieurs décennies. Ce que j'aime c'est des couleurs, pas clownesques mais la petite tonalité  qui illumine. Vous me direz c'est l'hiver et donc, en hiver, c'est acté, la mode en rajoute une couche: le froid, une lumière blafarde ou grise, des jours trop courts et des vétements moches et ternes.

 

Finalement,  nous nous sommes dirigées vers les Tuileries. Nous voilà chez Colette. AH Colette, un lieu incroyable. Un magasin où il n'ya que de l'inutile, tout ce dont tu peux te passer mais en plus tu ne peux rien en faire. Mais tout ce beau monde, branché, bobo s'ébahit. "Oh c'est trop fort..." devant un truc dont j'ai cherché l'usage. Ma fille m'a confirmé que ça ne servait pas forcément à quelque chose. Oui d'accord, il n'y a pas que l'utile dans la vie,  mais c'est même pas décoratif. Une minuscule tête de père noël avec un petit trou en dessous. Oh tout un symbole...

 

Jai fini ma ballade par  le jardin des Tuileries. Les portes fermées, j'ai affronté le sol glacé jusqu'à la Place de la Concorde où le ciel en feu m'a soufflé ces quelques photos.

 

La-concorde-compo.jpg

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